coffee homeground (libre)

slice of life.
feb. 2024 — blue bottle coffee, morningside. ft. who wants.

Elle cogne la balle avec ferveur, comme si elle mettait sa vie en jeu. Le regard déterminé, fixé sur la balle, chaque revers monte en puissance, si proche du but. Si proche du point, le point tant espéré. C’est pas une compétition, mais c’est tout comme. Y’a les vieux réflexes qui reviennent, les vieux souvenirs avec son père qui l’encourage, ou encore ses frères qui lui ébouriffent les cheveux en sortant du cours. Des bons souvenirs, en somme. Mais ce bref moment qui lui décroche un sourire, ça suffit pour lui faire perdre le point de justesse. Lissie, elle s’arrête net dans son effort, la tête en arrière, un grognement pour manifester sa frustration. Frustration de courte durée, bien évidemment. Lissie, elle est pas mauvaise perdante, bien au contraire. C’est pas ca qui va lui gâcher la journée. Elle s’avance pour saluer son partenaire de jeu, décroche un compliment en lui promettant de l’écraser la prochaine fois. Quittant le cours de tennis de Riverside Park, à deux pas de Columbia University, son casque sur les oreilles, la jeune femme se dirige d’un pas tranquille en direction d’un café qu’elle fréquent de temps à autres. C’est le matin, encore. Un weekend, en plus. Autant dire, pas grand monde. Un latte au lait d’amande, une commande un peu basic bitch qu’elle assume pleinement. Le breuvage est encore chaud, et sa précipitation, Lisse manque de renverser son précieux sésame pour les deux heures de sport qu’elle vient d’effectuer. « Oh shit », lâche-t-elle pleine de grâce, ne mesurant pas le volume de sa voix alors que la musique lui brise presque les tympans. Elle finit par retirer son casque, adressant un « Sorry » a son voisin, qu’elle vient clairement de déranger en pleine lecture. Un titre qui lui est bien familier, d’ailleurs. Et dans toute sa splendeur, le regard de la jeune femme s’illumine, lui offrant une opportunité de lancer la conversation. « Wait. You have impeccable reading taste. Fudging love that book. » Une gorgée de café, encore une fois dans la précipitation, histoire de continuer les bêtises. « Sorry, didn’t mean to interrupt you. Just got off tennis practice so still super hyper. » Rire gêné, signe que la brune doit apprendre à se taire, parfois. 

slice of life.
feb. 2024 — blue bottle coffee, morningside. ft. @lissie barnes.

Samedi. Elle devrait être en train de s’attaquer aux préparatifs de son mariage qui approche. Si vite. Bien trop vite à son goût. Elle voit les jours défiler. La date se rapprochait. Et rien n’est réellement préparé. Elle trouve toujours une excuse. Trouve toujours une façon d’esquiver. L’essayage de sa potentielle robe de mariée. Les faireparts qui ne sont jamais suffisamment à son goût. Le repas qu’elle trouve trop salé. Pas assez raffiné. Elle dit oui avant de faire marche arrière. Il y a cette force, ce fil invisible qui la pousse à saboter sa relation, son bonheur. Et c’est encore pire depuis que le visage de Juno est apparu sur les écrans du pays entier. Une émission de dating. Nan mais franchement … elle s’était attendue à tout venant de lui. Même les scénarios les plus loufoques et invraisemblables. Mais elle était loin d’avoir imaginé son meilleur ami dans une émission de dating. Pas après tout ce qu’ils avaient vécu. Les chemins. Les déviations. Les sens interdits qu’ils s’étaient pris. La dure réalité à laquelle ils avaient été confrontés. Non. Il avait fait son bonhomme de chemin et Love, elle s’apprêtait à dire oui. Alors en ce samedi, la boule au ventre, elle s’était éclipsée. Fiancé qu’elle avait abandonné au saut du lit, à défaut de l’abandonner devant l’autel. Elle avait prétexte une expérience de dernière minute. Un dernier papier à vérifier pour le labo. Mais ce n’était pas vers la fac qu’elle s’était dirigée. Ses pas l’avaient guidé jusqu’à un café non loin où elle s’était posée. Une part de red velvet cake. Un latte. Et un bon bouquin. De quoi oublier, l’espace d’un instant, tous ses petits tracas. S’imaginer l’espace d’un instant que tout allait bien et qu’elle n’était pas tiraillée entre la raison et la passion. Une bouchée de gâteau avalée, Lovisa tournait les pages de son livre. Besoin d’évasion. Sentiment momentané de liberté. Interrompu par les cris d’une personne. Certains avaient dû oublier où ils se trouvaient. Non pas qu’il y ait réellement une consigne ou un silence imposé comme dans n’importe quelle bibliothèque mais il y avait quand un certain niveau de décibels considéré comme acceptable. Surtout le matin. Encore plus le week-end. That’s fine … it happens, I guess. And at least, your coffee is safe … and so is my book. On aurait pu croire ses paroles vexantes ou Love agacée. Mais que nenni. Cette maladresse l’amusait beaucoup. Encore plus la petite expression qu’elle avait utilisée. Et puis, elle semblait avoir de bons goûts en matière de livres à en croire son commentaire. First time reading it. Didn’t know what to expect but I guess I should continue reading and see. Sourire échangé avant que, machinalement, elle ne décale sa commande vers elle. That’s totally fine. I wasn’t doing anything too serious, anyways. Wanna grab a seat ? La jeune femme était d’une spontanéité presque déconcertante ce qui lui rappelait étrangement l’une des candidates de l’émission ayant partagé la tête d’affiche avec Juno. Hmm … my question might sound very fan-like but … by any chance … weren’t you in that reality tv program recently? Question intéressée. Le besoin de savoir. Est-ce qu’elle savait quelque chose sur Juno et cette fille qu’il paradait à son bras ? et pourquoi avait-elle besoin de demander quand elle était avec un autre et s’apprêtait à franchir une étape aussi importante que le mariage.